Repenser l’efficience de la prise de contact : le levier stratégique sous-estimé de la relation client
Une vision relationnelle à refonder
Depuis dix ans, les entreprises ont massivement investi dans leurs dispositifs de relation client : multiplication des canaux, automatisation des réponses, centres de contact modernisés, CRM omnicanaux, chatbots ou encore FAQ dynamiques. Ces efforts visaient un objectif commun : rendre la marque plus disponible, réactive et accessible.
Mais cette promesse d’accessibilité atteint souvent ses limites. Le nombre d’interactions augmente, les outils se multiplient et malgré cela, la qualité perçue ne progresse pas à la même vitesse. Trop souvent, le client parvient à contacter la marque sans pour autant obtenir de réponse adaptée, de prise en charge cohérente ou d’expérience lisible.
La prise de contact a longtemps été abordée comme un point de friction à minimiser, un problème à résoudre pour fluidifier l’expérience. Pourtant, elle est un levier majeur de la relation client. C’est ce que la marque va choisir d’investir dans cette interaction et ce que le client va réellement en retirer.
D’autant plus dans le contexte actuel où l’humain est au centre du service client : exemple dans les secteurs automobile et bancaire où le contact humain est considéré comme indispensable pour respectivement 77% et 74% des Français (Livre blanc de l’étude Ipsos et Tersea sur « Les règles d’or du service client à l’ère du digital »).
Cette prise de contact devient alors une zone d’arbitrage critique pour les décideurs, révélatrice de :
Lavraie promesse relationnelle de l’entreprise, au-delà du marketing.
Sacapacité à traiter finement les contextes clients, et non plus seulement les flux.
Lamaturité de son modèle opérationnel, entre intensité humaine et automatisation.
Ce que cela change fondamentalement ? La prise de contact ne doit plus être pilotée comme un centre de coût. C’est un actif relationnel, un levier d’engagement et un révélateur de performance. Elle concentre en un instant la capacité d’une entreprise à être pertinente, fiable et différenciante.
Repenser la relation client, c’est abandonner les réponses génériques pour adopter une approche plus fine et personnalisée. Celle-ci doit être :
Contextuelle : une interaction n’a pas le même sens selon le moment, l’émotion ou l’intention du client. Le ton, le canal et la réactivité doivent s’ajuster à son contexte.
Segmentée : toutes les demandes ne se valent pas, et tous les clients n’ont pas les mêmes attentes ni la même valeur.
Orientée valeur : l’effort relationnel doit être calibré en fonction de ce qu’il rapporte réellement en termes de satisfaction, de fidélité ou de performance.
Trois leviers pour une stratégie relationnelle ciblée, cohérente et soutenable
Une relation client performante ne peut pas se définir par sa seule rapidité, sa couverture multicanale ou son degré d’automatisation. Ce qui distingue désormais une marque, c’est sa capacité à délivrer une expérience relationnelle juste, cohérente et soutenable.
Face à la multiplication des sollicitations, à la pression sur les coûts et à l’exigence croissante de personnalisation, il devient indispensable de piloter la relation client comme un actif stratégique. Cela passe notamment par trois leviers :
1. Tenir la promesse relationnelle
La promesse client (proximité, réactivité, simplicité) n’a de valeur que si elle se traduit concrètement dans les interactions.
Pour cela, il faut :
L’incarner dans chaque point de contact (ton, temps de réponse, capacité de résolution)
L’adapter aux différents profils clients
La mesurer à travers l’écart entre le discours et l’expérience réelle
L’objectif est de donner de la crédibilité à la marque et faire de l’expérience relationnelle un levier de confiance.
2. Adapter l’effort au contexte du client
Chaque interaction n’a pas la même valeur selon le moment et la situation du client. Il faut :
Identifier les moments clés du parcours (points de bascule, moments de vérité, situations de fragilité)
Segmenter les clients selon leur valeur économique et leur sensibilité relationnelle
Personnaliser l’effort là où cela a un impact réel sur la perception client
L’objectif est de personnaliser intelligemment là où la relation fait vraiment la différence.
3. Construire un modèle relationnel soutenable
Une stratégie relationnelle est optimale à condition d’être soutenable économiquement, opérationnellement et humainement. Cela suppose de sortir de la logique du “plus de service = meilleure expérience” pour adopter une posture d’excellence ciblée.
Cela implique alors :
L’automatisation des tâches à faible valeur humaine (gestion de demandes simples, traitements répétitifs)
La simplification des processus pour fluidifier l’expérience des deux côtés (client et collaborateur)
L’engagement humain sur les situations à fort enjeu relationnel (émotion, fidélisation)
Cela à pour objectif de bâtir une organisation combinant efficacement les forces de l’IA, les outils et l’humain selon les cas d’usage.
Deux principes pour transformer une intention relationnelle en performance durable
Les trois leviers précédents définissent ce que doit être une stratégie relationnelle bien calibrée. Mais pour passer de la réflexion à l’action, encore faut-il s’appuyer sur deux principes fondamentaux qui structurent les arbitrages pour les décideurs : cibler l’effort relationneletpiloter par la valeur. Ces deux principes permettent de passer d’une relation client fondée sur des standards uniformes à une approche contextuelle, sélective et assumée, qui met les ressources là où elles comptent.
1. Cibler l’effort relationnel
Toutes les interactions ne se valent pas. Certaines exigent un contact humain, d’autres peuvent être traitées de manière autonome. Appliquer des règles identiques pour toutes, c’est perdre en efficacité, en pertinence et en différenciation.
Cela implique :
De différencier les traitements selon la nature de la demande (transactionnelle, émotionnelle, prescriptive, conflictuelle…).
D’intégrer le profil client dans les règles de gestion (valeur actuelle, potentiel, historique, autonomie…).
De redéfinir le rôle des canaux : certains sont faits pour l’autonomie, d’autres pour l’accompagnement, d’autres encore pour gérer l’exception.
Cibler, ce n’est pas exclure. C’est personnaliser avec discernement, pour maximiser l’effet de chaque interaction.
2. Piloter la relation par sa valeur réelle
Trop souvent, la performance relationnelle est pilotée par défaut : taux de réponse, NPS global, taux de contact ou coûts moyens. Ces indicateurs sont nécessaires mais pas suffisants. Ils ne disent pas où se fait réellement la différence dans la relation, ni ce qu’elle rapporte.
Piloter par la valeur, c’est se poser trois questions concrètes :
Quelles interactions génèrent un impact mesurable sur la fidélité ou l’engagement ?
Où un effort supplémentaire change-t-il réellement l’expérience perçue ?
Où peut-on ajuster sans détériorer la qualité relationnelle ?
Cela suppose :
Des outils de mesure solides, capables de croiser données opérationnelles, comportements client, et valeur long terme (LTV, churn, recommandation…).
Une culture du test : mesurer les effets réels de différentes configurations relationnelles.
Une gouvernance transverse entre relation client, data, commerce et marketing.
L’objectif est de faire de la relation un levier de performance, pas une zone de coûts flous.
Le ciblage et le pilotage par la valeur forment le socle d’un modèle relationnel rationnel et différenciant. Un modèle dans lequel on ne cherche pas à tout promettre à tout le monde, mais à offrir le bon niveau d’attention au bon moment, pour le bon client.
C’est dans cette capacité à orchestrer l’effort relationnel avec discernement que se joue une grande part de la compétitivité des marques à horizon court terme.
L’IA générative : catalyseur d’une nouvelle efficience relationnelle
L’arrivée de l’IA générative impose un changement d’échelle dans la manière d’organiser, de piloter et de penser la relation client.
Jusqu’ici, les efforts d’optimisation relationnelle s’inscrivaient dans une logique d’industrialisation classique : automatiser les tâches répétitives, réduire les temps de traitement et renforcer la disponibilité des services. Désormais, il s’agit de reproduire des comportements conversationnels complexes, d’adapter les réponses à l’intention exprimée et de mettre en scène une relation enrichie.
Le potentiel est massif. Selon le Hub Institute, l’IA générative pourrait générer jusqu’à 7 % de gains de productivité annuelle pour les grandes entreprises françaises. Et selon le BCG, 67 % des dirigeants prévoient d’intégrer des agents IA dès 2025 dans leurs modèles de service. Une bascule structurelle est en cours, notamment dans les secteurs à forte intensité relationnelle (banque, assurance, télécoms, services clients).
Un levier direct sur l’efficience relationnelle
Dans ce contexte, l’IA générative ne remplace pas les fondamentaux. Elle vient accélérer et renforcer les deux principes structurants d’une stratégie relationnelle efficiente :
Sur le ciblage de l’effort : elle permet de traiter un grand volume de sollicitations simples ou modérées avec un haut niveau de fluidité, de cohérence et même d’empathie simulée. Cela libère les équipes humaines pour les moments qui exigent discernement, lien, ou réassurance.
Sur le pilotage par la valeur : elle enrichit la capacité à analyser, prédire et hiérarchiser les interactions. L’IA peut aider à distinguer ce qui est perçu comme utile, ce qui déclenche de la fidélité, ou ce qui constitue un point de rupture potentiel et donc à orienter les ressources là où elles ont le plus d’effet.
L’IA générative impose un nouveau contrat relationnel
Ce changement technologique entraîne une réévaluation du rôle de la marque dans l’interaction client. Quand une part croissante des échanges est automatisée, il ne suffit plus de garantir une réponse. Il faut se demander quelle expérience la marque souhaite incarner, même à travers un agent IA.
Trois questions deviennent structurantes :
Quel niveau d’écoute, de personnalisation, de réactivité est acceptable ou attendu dans une interaction automatisée ?
Quelles sont les situations où l’humain reste indispensable pour porter la promesse de la marque ?
Et comment maintenir une cohérence perçue, quand le client alterne, parfois dans la même journée, entre IA, interface digitale et conseiller humain ?
La technologie permet d’aller plus loin. Mais elle oblige surtout à repositionner le curseur relationnel et à clarifier ce qui relève de la marque et ce qui peut être délégué à la machine.
Ce “contrat relationnel augmenté”, entre promesse, attente client et capacité technologique devient un nouveau terrain stratégique. Et les marques qui le piloteront avec exigence auront un coup d’avance.
Article rédigé par Laurent Rodrigues et Thomas Soulié.
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